1870: La guerre

 

 

   
 
 

     
    
      Après la percée des troupes prussiennes à Sedan, Monet avait estimé le moment venu de quiter la France. avant de prendre la malle de Portsmouth, il laissa plusieurs toiles à Louveciennes, chez Pissarro. Quelques jours plus tard, Pissarro décida à son tour de quitter Paris. Située sur la route principale vernant du nord-ouest en direction de la capitale, Louveciennes était un objectif allemand prévisible. Pissarro entassa tous ses tableaux - plusieurs centainnes, le travail de sa vie - en les cachant du mieux qu'il put, puis il emmena sa petite famille chez son ami Ludovic Piette à Montfoucault, dans la mayenne, mais cela ne semblait guère plus sûr: aussi, aidé sans doute financièrement par Pierre, il traversa également la manche.
      A Londres, Monet rendit visite à Daubigny, refugié lui aussi en angleterre depuis quelque temps. Touché par la détresse de Monet, Daubigny lui parla d'un jeune marchand français, nommé Paul-Durand-Ruel, qui avait fui Paris en emportant tous ses tableaux et s'était installé à New Bond Street. Durand-Ruel, qui avait remarqué les oeuvres du peintre mais n'avait pas encore eu l'occssion de le rencontrer, acheta plusieurs oeuvres de Monet à 300 francas la toile. "Il faut que je vence ici une quantité de vos toiles", dit-il.. Pissarro et Julie, arrivant à Londres peu avant la naissance de Leur troisième enfant, furent accueillis dans la maison de Phineas Isaacson et de sa femme, demi-sceur de Pissarro: c'est là qu'ils se marièrent peu aprés. Pissarro alla lui aussi voir Daubigny, gràce auquel it vendit un tableau à Durand-Ruel et entra en contact avec Monet.
      Monet et Pissarro furent représentés par deux tableaux à la section française de l'Exposition internationale de South Kensington en 1871, sans doute grâce aux efforts de Durand-Ruel. Les Tableaux qu'ils soumirent pour l'exposition de l'Académie Royale furent "naturellment refusés". Ce "naturellement"était un écho de la manière dont ils étaient habituellement traités par les académies; ce n' étaient pas Constable ou Turner qui étaient à la mode dans les milieux artittiques anglais, mais Dante Gabriel Rosseti, qui, tout récemment, avait fait savoir, aprés une brève visite à Paris, qu'à son avis "la nouvelle école française n'était tout simplement que pourriture et décomposition".
      Pissarro écrivit à Théodore Duret qu'il allait revenir à Paris dès que possible. "Oui, mon cher Duret, je ne resterair pas ici, et ce n'est qu'à l'étranger que l'on sent combien la France est belle, grande, hospitalière. Quelle différence ici! On ne recueille que mépris, l'indifférence et même la grossièreté; parmi les confrères, la jalouise et la défiance la plus égoiste. Ici, il n'y a point d'art; tout est affaire de commerce."
     A son retour à Paris, peu après le retrait des troupes allemandes, Pissarro eut quelque peine à reconnaître sa maison de louveciennes. Pendant son absence, elle avait été utilieée comme abattoir par un groupe d'intendance de l'armée allemande. Boeufs, moutons et porcs, abattus et pendus pour être écorchés, avaisnt saturé le sol de leur sang tout autour de la maison. pour préserver leurs bottes de cet ignoble marécage, les bouchers de l'intendance allemande avaient tapissé les endroits où ils passaient de caillebotis fabriqués avec les toiles de pissarro (et celles de Monet).

 

     

       Bazille avait obtenu son poste d'officier au 3 ͤ Zouaves par son ami le prince Bibesco, officer d'ordonnance de l'état-major du général Du Barail. Après un bref stage d'entraînement en Algérie, il vait participé à cette action tardive entreprise sous les ordres des généraux Aurelle, Chanzy et Martin des Palières, que avait permis de remporter quelques succès initiaux dans la région d'Orléans,mais qui avait ensuite dégénéré parce que, d'après un rapport de l'état-major, les troupes engagées dans ces opérations étaient des hommes qui savaient se faire tuer, mais non des soldats. Renoir avait décliné l'offre du prince Bibesco de l'aider comme il l'avait fait pour bazille, mais ce dernier lui avait suggéré de s'engager dans un régiment de cavalalerie; il avait accepté cette proposition, en dépitdu fait qu'il n'était jamais monté sur un cheval. Envoyé à Bordeaux pour son instruction, Renoir peignit un portrait de son capitaine et un autre de la femme de celuici, dont Renoir dira plus tard que, dans ses idées sur l'art, "elle fut bientôt plus révolucionnaire que lui". Lorsque son capitaine fut muté à Tarbes pour y surveiller le dressage des chevaux de remonte. Renoir l'accompagna et devint repidement un cavalier accompli. Cependant, au cours d'une épidérmie, il tomba malade et un de ses oncles l'emmena à Bordeaux.
      Dès l'armistice et la démobilisation générale, renoir reprit le chemin de Paris, où il apprit la mort de Bazille. Au cours de la retraite, le jeune officer, qui, de grande taille, était facile à repérer, était tombé, victime, semble-t-il, d'un tireur isolé, sur une route glacée proche de Beaune-la-Roland, à une trentaine de kilomètres au sud de cette forêt de Fontainebleau où il avait passé tant de jours pleins d'epoir.

 
 

 


   
"Papa trouvera Paris dans un état d'excitation bien étonnant, et qui finira mal, certainement. Je n'ai pu aller à l'enterrement de Victor Noir à cause de la pluie battant qui tombait ce jour-lá, et puis parce que je posais pour le tableau de fantin, un de mes amis. Mais j'ai vu passer sur le boulevard extérieur toutes les bandes qui s'y rendaient. Il ne restait pas un seul ouvrier dans Paris. Sans Rochefort, les deux cent mille hommes (au moins) se faisaient mitrailler horriblement. Tu verras que tout cela finira mal, ce n'est plus de la farce, il y a une irritation générale, qui fera partir les coups de fusil à une occasion quelconque, qui ne manquera pas.

Bazzille, lettre à sa mère, janvier 1870.

Une barricade rue de le Paix pendant la Commune, photographie - 1871.

Edouard Manet: La guerre cívili, eau-forte - 1871

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