Prévoyant qu'il serait refusé à l'Exposition Universelle de a1867, Manet, à l'exemple de Coubert, ouvre à ses frais une exposition particulaire dans une baraque en bois située à l'angle des avenues de l'Alma et de Montaigne, où il présente cinquante toiles. Dans la préface du catalague, il justifie son attitude et définit sa démarche:

 

 

 

 

 

MOTIFS D'UNE EXPOSITION PARTICULAIRE


Depuis 1861, M. Manet expose ou tente d'expose.
Cette année, il s'est décidé à monter directement au public l'ensemble de ses travaux.
A ses débuts au salon, M.Manet obtenait une mention. mais ensuite il s'est vu trop souvent écarté par le jury pour ne pa penser que si les tentatives d'art sont un combat, au moins faut-il lutter à armes égales, c'est-à-dire pouvoir monter aussi ce qu'on a fait.
Sans cela, le peintre serait trop facilment enfermé dans un cercle dont on ne sort plus. On le forcerait à emplier ses toiles ou à ls rouler dans un grenier.
L'admission, l'encouragement, les récompenses officielles sont en effet, dit-on, un brevet de talent au yeux d'une partie du public prévenue dès lors pour ou controle les oeuvres reçues ou refusées. Mais, d'un autre côté, on affirme au peintre que c'est l'impression spontanée. de ce même public qui motive le peu d'accueil que font les divers jurys à ses toiles.
Dans cette situation, on a conseillé à artiste d'attendre.
Attendre quoi? Qu'il n'y ait plus de jury?
Il a mieux aimé trancher la question avec le public.
L'artiste ne di pas aujourd'hui: venez voir des oeuvres sans défauts, mais: venez voir des euvres sincères.
C'est l'effet de la sincérité de donner aux oeuvres un caractère qui les fait resembler à une protestation, alors que le peintre n'a songé qu'à rendre son impression.
M. Manet n'a jamais voulu protester. C'est contre lui, qui ne s'y attendait pas, qu'on a protesté au contraire, parce qu'il y a un enseignement traditionel de formes, de moyens, d'aspects de peinture, et que ceux qui ont été élevés dans de tels principes n'en admettent plus d'autres. Ils y puident une naïve intorelance. En dehors d leurs formules rien ne peut valoir, et ilsse font non seulement critiques, mais adversaires et adversires actifis.
Montrer est la question vital, le sine qua non pour l'artiste, car il arrive après quelques contemplations qu'on se familiarise avec ce qui surprenait et, si l'on veut, choquait. Peu à peu on le comprend et on l'admet.
Le temps lui-même agit sur les tableaux avec un insensible polissoir et en fond les rudesses primiives.
Monter, c'est trouver des amis et desalliés pour la lute.
M. Manet a toujours reconnu le talent là où il s trouve et n'a prétendu ni renverser une ancienne peinture ni en créer une nouvelle. Il a cherché simplement à être lui-meme et non autre.
D'ailleurs, M. Manet a rencontré d'importantes sympathies et il a pu s'apercevoir combien les jugements des hommes d'un vrai talent lui deviennent de jour en jour plus favorables.
Il ne s'agit donc plus, pour le peintre, que de se cocilier ce public dont on lui a fait un soi-disant ennemi.

                                                                             Mai 1867
 

 
 
 
   

 

Catalogue de
l'exposition particulière de Manet
en 1867

 

 

Edouard Manet:
Le fifre - 1866

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