Gleyre, Cormon, Robert, Breton,
ces quatre peintres comptent parmi les gloires
officielles du XIXe siècle et ils sont parmi
ceux qui reçoivent la Légion d'honneur, les
médailles et les commandes de l'Etat ou des
princes. ils n'ont pas exposé les oeuvres que
nous reproduisons au même Salon, mais ils
illustrent cette officialité contre laquelle
s'insurgent les créateurs.
Le scandale du Salon atteint son paroxysme sous
Napoléon III. Bien que la composition du jury
ait été partiellement réformée, son esprit ne
peut changer tant que les représentants de
l'institut et de l'Academie détiennent la
majorité et restent les représentants de
l'autorité politique. la liberté des véritables
créateurs est menacée; ceux-ci sont parfois
obligés de produire deux sortes d'oeuvres: les
unes por le Salon, les autres, personnelles,
qu'ils n'osent montrer. La tyrannie du jury est
d'autant plus grave que le Salon est la seule
occasion pour les artistes de se montrer au
pblic, les musées n'ayant qu'une activité de "conservatoire"
et les galeries privées étant fort rares. Les
peintres qui triomphent au Salon ne sont pas
obligatoirement dénués dequalité, mais ils ne
pensent même pas qu'ils pourraient préférer la
vérité de leur sensation à l'habileté età
réussite.
Plaire au jury revient à accepter une manière de
voir déjà reconnue, à se couler dans un moule
tout fait; les classiques se teintent de
romantisme pour être plus modernes; les
romantiques de tempéament refrènent l'élan de
leur main et l'éclat de leur palette por renouer
avec la primauté de la forme.
|
|
La peiture est
ramenée à l'illustration, la personnalité au
savoir-faire.
Au XVe siècle, les maitres de la Renaissance
avaient défini un espace où la perspective
normale marquait la domination de l'homme sur la
nature; ce mod de représentation s'imposa comme
système ideal et absolu et ne fut plus mis en
doute jusqu'au XIXe siècle. Mais finalement les
artiste se bornaient souvent à donner des
interprétations différentes d'un schéma reconnu,
les plus médiocres aboutissant inévitablement à
une idéalisation stéréotypée ou au débordement
des sentiments. Le public en vint tout
naturellement à assimiler la qualité du tableau
au sujet raconté.
Alors que le XIXe siècle tout entier est tourné
vers l'étude des phénomènes du réel, les
peintres officiels restent fidèles à la
rassurante fiction de l'illusionisme. Tandis que
Gleyre teinte le classicisme de David de
mélancolie romantique, Léopold Robert folklorise
sentimentalement Poussin, Breton idéalise et
édulcore Millet, Cormon donne un écho grotesque
au sentiment épique de Vitor Hugo. Mais la
fausse doucer de Breton ne résistera pas
longtemps devant la force de vérité de Coubert,
ni la grandiloquence de Cormon devant le drame
de Daumier. Dnas son prodigieux essor, la
photofraphie confirmera l'intuition des peintres
réalistes et condamnera l'idealisation. Mais
ceux qui s'attachement à transposer leurs
découvertes optiques seron longtemps accusés de
révolutionnaires vulgaires et dangereux. |